Ce qu’en pensent les jeunes ?

Quel avenir pour les jeunes d’aujourd’hui ? Comment se voient-ils en 2020, 2030… (Présence Mariste N° 274, Janvier 2013)

TÉMOIGNAGES

C’est d’abord à eux qu’appartient l’avenir… C’est donc d’abord eux qui doivent dire comment ils se voient dans 20 ans, dans 30 ans…
Et comment ils voient le monde pour leurs propres enfants.
Sont-ils conscients de l’importance de la période qu’ils vivent ?
En tirent-ils l’enthousiasme du projet, ou se laissent-ils sombrer dans l’angoisse des incertitudes et du vide ? Marie Françoise Poughon a posé la question à quelques lycéens… Écoutons-les !

[rouge]Alexia, 17 ans, TL
Moi, l’homme de demain, je le vois avec plein de soucis, de problèmes. Mais surtout ce qui me fait peur, c’est que je pense que ce sera très difficile de pouvoir s’aimer vraiment et de garder des valeurs comme la famille ou la solidarité, car je trouve que ça va trop vite, qu’on devient de plus en plus égoïste. On ne pense qu’à soi et à son plaisir personnel alors qu’on est de plus en plus entouré de gens pauvres.[/rouge]

[violet]Laura, 16 ans, TES
Comment je serai dans vingt ou trente ans, je suis très embêtée, car ça change tellement vite que j’ai du mal. Il y aura des ordis partout et il faudra faire avec. Pour avoir des gosses j’espère que ce ne sera pas ainsi mais qu’il y aura du vrai amour, qu’on pourra rester humains et pas devenir des machines. Mais on s’habituera comme on s’est habitué à ce qu’on vit maintenant, qui est très différent du monde de nos parents ou grands parents.[/violet]

Bernard, 18 ans, TS
Pour les gens ça sera vachement plus facile de vivre matériellement, on n’aura presque besoin que d’une clé USB, au lieu de s’embarrasser la vie. Peut-être même que les voitures rouleront toutes seules sans qu’on soit au volant ! Mais je crois que c’est nul, car que seront les rapports humains si on n’est qu’avec des machines ?

Jeunes au CDI

[brun]Marina, 15 ans, 1re
L’homme de demain, c’est chacun qui va l’être et qui doit s’y préparer, en sachant que ce ne sera pas facile du tout et que ça se prépare maintenant avec le lycée et avec la famille. Il faut qu’on étudie, qu’on regarde et qu’on essaie de changer en mieux tout ce qui ne va pas, comme la violence, la drogue, la perte de valeur, l’amour abîmé et pas respecté. D’un côté ça me fait peur et de l’autre c’est super si on peut changer en mieux grâce à nous. Mais c’est dur ! Ça demande de la patience et beaucoup de forces et de réflexion, parce qu’on ne réfléchira peut-être pas tous pareil.[/brun]

[bleu violet]Xavier, 16 ans, TS
Je pense qu’il ne faut pas penser dans le détail à ce qu’on sera, on le verra bien quand ça arrivera. Par contre je pense que nous les jeunes, on doit se préparer à vivre tout ce que l’avenir nous réserve de la meilleure façon possible, en apprenant à gérer l’informatique, à être écolos, à savoir prendre des responsabilités et à ne pas tout accepter bêtement, à réfléchir, à se préparer à être ce qu’on sera. Et on sera sans doute parents, alors il faudra savoir gérer aussi l’éducation des enfants, mais dans l’amour et le respect réciproques. Et puis avec internet on sera toujours en contact avec le monde entier pour le bien comme pour le mal, mais ça peut être super car on pourra aussi vachement s’aider si on veut… Faut positiver toujours ![/bleu violet]

[prune]Maxime, 16 ans, 1èreS
Moi je pense que l’homme de demain, il ne sera jamais seul, qu’il n’aura jamais le temps de réfléchir seul, car la société sera bruyante, envahissante, profiteuse des plus faibles. Alors tant qu’à faire, vaudrait mieux tout de suite s’habituer à ce phénomène groupe. Ou s’il sera seul, ce sera devant un ordi, avec Facebook par exemple, c’est-à-dire avec le monde entier. Il essaiera de tout faire, non pour être au milieu de la foule et des gens, mais avec, c’est-à-dire participer avec l’ensemble et non faire comme les autres, comme les moutons sans réfléchir. Oui, il faudra beaucoup réfléchir ensemble pour trouver et vivre ce qui pourra faire avancer positivement le monde et je dois dire qu’une telle responsabilité, même si ça me plaît d’un côté, de l’autre ça me « met les boules »…[/prune]

Frère Jean-Louis, « serviteur des jeunes »

F. Jean Louis Vialaton passe son temps avec des jeunes de quartiers difficiles de St-Étienne… Il est en contact direct avec leurs préoccupations !
Ne dépassent-elles pas le « que faire » samedi soir, ou le lien amoureux du moment ?
Sa parole de terrain met en lumière tous les enjeux de l’éducation aujourd’hui : s’extraire de l’immédiat, aller vers le sens, valoriser la personne, donner l’envie de se battre…

Comment tu te projettes dans l’avenir ? Qu’imagines-tu pour demain ? Quelques bribes recueillies dans un groupe de terminale à 5 minutes du cours suivant …
« Je ne me projette pas… Parce que je n’ai pas la capacité de le faire. Ça dépendra du bac… C’est difficile à vivre pour nos parents, qui trouvent qu’on ne bosse pas assez, pour décrocher l’école d’ingénieur dont ils rêvent… J’aimerais vivre en colocation avec mes amis, tant que je suis jeune ! J’aimerais profiter de ma jeunesse : voyager, rencontrer des gens, faire la fête… Mais ça dépend du bac ! »

L’avenir, c’est le week-end qui arrive !
Pour l’immense majorité des lycéens, l’avenir c’est le week-end qui vient ! Que vais-je faire ? Avec qui ? Comment ? Où vais-je trouver du fric pour sortir avec mes potes ? Quel garçon ou quelle fille voudra sortir avec moi ? Tout sauf rester à la maison ! « Je deviendrais fou, si je restais chez moi ! »

Ce qu’ils prévoient ? Les vacances de Toussaint qui arrivent : dosage artistique de 3 choses : Travail, Amis, Famille. Les choix sont difficiles à faire parce que « nous avons trop de choix ».

Le fond de l’air est pollué par un pessimisme ambiant bien plus dangereux pour la santé que le CO2 !

Je ne cesse de remonter le moral des lycéens ou collégiens qui fréquentent l’aumônerie. Beaucoup ont d’eux-mêmes une triste image. Pourtant, à les voir faire, on les croirait très sûrs d’eux ! Les apparences sont trompeuses…

La crise ? Oui sûrement ! Mais aussi le résultat d’une éducation sans projets ! Je hurle de colère devant ces adultes qui se cachent derrière des formules : « C’est à lui/elle de décider ! » « Je lui fais la proposition… il/elle réfléchit ». « Adolescents » ? Peuple d’adultes lui-même sans avenir ?…

F. Jean-Louis à l’écoute, même pendant le temps du repas

Un peuple sans berger
Quand on a 11 ans, faire des choix du matin au soir, c’est épuisant ! Je ne m’étonne plus que la majorité ne choisisse plus rien ensuite ! Nous leur faisons croire à leur « toute-puissance » imaginaire ! Je décide de tout ! Donc, j’existe… donc, j’imagine que je fais la loi ! Hélas, la réalité est vite au rendez-vous, et parfois « ça cogne » ! Échec ! Déception amoureuse ! Recherche d’un travail sans résultat ! …

Comme dit Jésus : « Peuple sans berger »… La tâche est immense et les volontaires peu nombreux ! Bergers, faites-vous connaître, ce peuple a besoin de vous ! La pollution du portable n’arrange rien ! Ce merveilleux outil (d’excommunication) n’est pas fourni avec le mode d’emploi. Quand j’ai une proposition, j’attends la suivante… au cas où elle serait plus alléchante ! Donc, « je verrai » ! Et je ne m’engage pas !…

Ce peuple des jeunes est un peuple de pauvres ! Même si certains ont entre les mains des outils que je ne puis m’offrir, ce sont des PAUVRES ! Exploités, puisque sans projets ! Manipulés, puisque leurs éducateurs les laissent aux prises avec un environnement sans pitié ! « Profite bien de ta jeunesse ! »

Pessimiste, moi ? Jamais ! Le « vivre-avec » prôné par Marcellin Champagnat, me donne l’audace d’un parler-franc et de leur dire NON très souvent ! Tout simplement parce que je crois en eux.

Dans une société qui ne cesse de « pommader » la jeunesse (tout le monde veut rester jeune, à en être ridicule), consommation oblige, les éducateurs chrétiens ont du boulot !

Serviteur mais non serveur ! Serviteur des jeunes, comme Marie, mais pas la « bonne ». Jamais !


F. Jean-Louis VIALATON
(Paru dans Présence mariste N° 274 Janvier 2013)

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