Rencontre avec… Mathieu

Mathieu fait partie de l’équipe des maçons qui a travaillé à la rénovation de la maison des Frères à La Valla en Gier. Cette équipe comprenait trois autres jeunes de 18 à 22 ans. F. Michel Morel a été impressionné par la simplicité de relation et l’énergie au travail de ces jeunes. (« Présence Mariste » n°277, octobre 2013)

Mathieu Flavin fait partie de l’équipe des maçons qui a travaillé à la rénovation de la maison des Frères à La Valla en Gier, de septembre 2012 à juillet 2013. Cette équipe comprenait trois autres jeunes de 18 à 22 ans, dont Jérémy, le frère jumeau de Mathieu. Leur simplicité de relation et leur énergie au travail m’ont fait souhaiter rencontrer l’un d’eux pour mieux le connaître.
Mathieu
Photo Famille Flavin

Le métier de maçon

Mathieu est âgé de 22 ans. Après avoir passé son BEP et son B. P. en maçonnerie, il a commencé à travailler à 18 ans. Pourquoi le choix de ce métier difficile ?

« Ne sachant pas trop où m’orienter, j’ai fait aussi un stage de maçon, en classe de 3e. J’ai finalement choisi de devenir maçon pour mieux assurer mon avenir et prendre ma vie en main ».

Ce métier qui demande de grandes qualités physiques correspond bien, en fait, à son caractère, débordant d’énergie. Mathieu aime fabriquer quelque chose avec ses mains. Voir des bâtiments aux formes géométriques le fascine et ce serait pour lui comme un défi que de pouvoir en faire autant.

Ce métier est-il plus difficile que d’autres ?
« Sans doute, pas ; même s’il est difficile physiquement et qu’il faut être courageux. »

Et par rapport à ses copains, être maçon ? Il reconnaît que certaines propos du genre :
« T’as pas de cervelle, t’es maçon »

ont pu le toucher ; mais il lui en faut davantage pour le désarçonner. Il pense plutôt que ce sont ceux qui les profèrent qui sont stupides.
« Je ne relève pas, dit-il. »

Christophe, le chef maçon du chantier
Photo F. Jean Ronzon

Le travail en équipe

Mathieu travaille seulement depuis 2 ans dans l’entreprise Ranc et Genevois. C’est le premier chantier où il travaille dans cette équipe dirigée par Christophe. Il apprécie d’en faire partie. Il y a de la convivialité entre les ouvriers et le chef. Celui-ci est à leur écoute.
« Il sait nous demander notre point de vue pour faire ou tel travail ou résoudre tel ou tel problème. »

Mathieu croit savoir que, si lui et son frère ont été choisis pour faire ce chantier avec Christophe, c’est parce qu’ils ont fait leurs preuves, qu’ils ne rechignent pas devant le travail à faire, y compris les tâches les plus ingrates ; qu’ils mettent du cœur à l’ouvrage. Il dit de Christophe, son chef :

« C’est la personne qui peut tout m’apprendre dans mon métier. Il est comme un peintre qui maîtrise toute la palette des couleurs. Il peut m’aider à en maîtriser chaque jour un peu plus. »

Bel hommage de l’élève envers son maître ! Il reconnaît l’importance des relations humaines pour avancer dans son métier et dans la vie.

Le chantier de La Valla

Mathieu sait que la maison qu’il rénove est une maison un peu spéciale : la maison de fondation des Frères Maristes. Ce chantier l’intéresse d’abord à cause de sa complexité, de la diversité des tâches à accomplir.

« Ce n’est pas un travail monotone. On nous laisse une certaine liberté dans les tâches à faire ; il faut savoir s’adapter à ce qui est à faire. J’apprends beaucoup en travaillant sur ce chantier. »

Il ressent, à juste titre, une certaine fierté à travailler à la rénovation d’une maison riche d’une longue histoire.
« Mon travail prend un autre sens, dit-il. »

Jérémie, le frère jumeau de Mathieu
Photo F. Jean Ronzon

Mathieu et sa famille

Ce qui frappe le plus au fur et à mesure de la conversation, c’est l’assurance et même la force tranquilles de Mathieu, même si c’est un garçon plein d’énergie. D’où cela lui vient-il ? À la question : y a-t-il des personnages que tu admires, la réponse est immédiate :

« Mes parents et mes grands-parents ! C’est grâce à eux que je suis devenu ce que je suis aujourd’hui. À travers la façon de m’éduquer, ils m’ont appris à être moi-même, à savoir vivre avec d’autres, à devenir autonome. »

Il faut dire que ses parents, maraîchers sur les hauteurs de Ste Colombe-69, ont su lui inculquer le sens du travail. Matthieu et Jérémy continuent d’ailleurs à leur donner volontiers un coup de main dans le travail des champs, même après leur journée de travail. L’exemple de la vie difficile de ses grands-parents et celui de la vie laborieuse de ses parents lui font voir la vie avec une certaine sagesse. Une phrase m’a frappé : « Moi et mon frère, on peut pas être plus heureux ! Cela m’invite à beaucoup de respect à l’égard de mes parents. »

Avec Jérémy, son frère jumeau

On peut être surpris de retrouver les deux frères exerçant le même métier dans la même entreprise et, pour l’heure, sur le même chantier. Pour Mathieu, cette situation ne semble pas lui poser problème. C’est plutôt une aide sur le chantier.

« On se comprend bien avec Jérémy, même sans paroles ; il suffit de se regarder. Il y a une grande complicité entre nous. Quand quelque chose ne va pas chez Jérémy, je le sens tout de suite et réciproquement. »

Et l’avenir ?

La maison Champagnat en rénovation
Photo F. Jean Ronzon

Mathieu affirme ne pas trop se projeter dans l’avenir.
« Je marche au feeling. Je m’adapterai aux circonstances qui se présenteront. »

Même si l’un de ses rêves serait d’être capable de construire entièrement une maison, du moins le gros œuvre, y compris la charpente.

Les questions métaphysiques ne semblent guère le préoccuper pour le moment ; même s’il se pose parfois la question :
"Pourquoi est-on sur terre ?"
L’avenir ne semble pas l’inquiéter, du moins pour lui-même. Il se considère mieux armé que beaucoup d’autres jeunes d’aujourd’hui pour affronter l’avenir car, souligne-t-il
« mes parents m’ont toujours aidé à aller de l’avant, à faire face aux difficultés… »

Garçon étonnant que ce Mathieu : à la fois bien de son temps, confiant dans l’avenir, aimant les contacts avec les gens ; ardent au travail, aimant les choses simples de la vie : être seul dans la nature, pêcher, regarder les insectes, le gibier, être avec ses copains ; souhaitant une plus grande autonomie dans sa vie personnelle mais heureux de rester encore chez ses parents…

Sans vouloir tout rattacher à Marcellin Champagnat, puisque c’est sa maison d’origine qui a été l’occasion de ce chantier et de cette rencontre, il me plaît de penser que Marcellin, jeune prêtre de 27 ans, à son arrivée à La Valla aurait aimé rencontrer Matthieu, Jérémy, Valentin et Dorian. Pour quel apprentissage ? Laissons la réponse ouverte.

Propos recueillis par F. Michel MOREL
(Publié dans « Présence Mariste » n°277, octobre 2013)

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