L’école d’aujourd’hui pour l’homme de demain

Une expérimentation d’une nouvelle façon d’enseigner dans l’établissement des Maristes à Bourg-de-Péage (Présence Mariste N° 274 Janvier 2013)

Expérimentation aux Maristes de Bourg-de-Péage

Dans nos établissements, depuis bien longtemps, nos équipes sont hantées par la rapidité avec laquelle ils voient changer les mentalités de leurs élèves. Est-ce la fin de l’école telle que nous la connaissons ? Ou est-ce au contraire une nouvelle naissance sous la forme de l’accompagnement des élèves avec la nécessité de mettre de la cohérence dans les connaissances et d’instaurer un lien social entre eux.
À Bourg-de-Péage, une équipe de professeurs a lancé cette année une action basée sur l’accompagnement des élèves vers la cohérence de leur savoir, la mutualisation des intelligences sous toutes leurs formes, l’esprit critique et la recherche du sens…

Notre projet est parti de la conviction que nous ne pouvions plus enseigner comme avant, au risque d’accentuer cette rupture que nous commençons à ressentir entre l’école et les élèves… Nous l’expérimentons pour le moment sur une classe de 6e, en souhaitant bien sûr l’étendre sur le collège. Notre objectif est avant tout une lutte contre l’échec et la souffrance à l’école souvent liés à l’ennui et aux peurs scolaires. Face à ce constat, nous voulons développer la motivation en retrouvant « le plaisir d’apprendre » où l’élève est mis en situation de réussite et de valorisation.

Travail d’élève avec les moyens modernes


Pour avancer dans cette perspective et oser changer nos pratiques d’enseignants, nous avons conçu un « nouvel espace classe » afin de mieux prendre en compte les besoins fondamentaux des élèves et des professeurs. En effet, cet aménagement facilite des pédagogies plus innovantes permettant de rythmer le travail des élèves sur une seule journée et facilite la mise en œuvre de deux concepts : le travail coopératif et la prise en compte de toutes les formes d’intelligences dans les apprentissages.

Le travail coopératif

Il s’agit en même temps de donner une base quasi morale aux rapports sociaux dans la classe, et d’utiliser ces derniers pour accéder à la cohérence des savoirs, à l’esprit critique et au sens… Confiance dans l’autre et en son travail, droit à l’erreur, ouverture d’esprit, apprentissage et évaluation des compétences… constituent la base de notre pédagogie. Ces orientations ne sont pas de vains mots et se déclinent en dispositions concrètes acceptées par tous. Par exemple, nous avons imaginé quatre plans de classe fonctionnels permettant des postures d’élèves et des comportements adaptés en fonction du travail demandé. L’enseignant peut ainsi évaluer des compétences d’entraide, d’engagement, d’écoute attentive…

L’intelligence multiple

L’intelligence multiple ne vise pas à classifier les élèves en fonction de leur forme d’intelligence, mais au contraire à utiliser pour les groupes, en les additionnant, les différentes facettes de l’intelligence de chacun.
Double bénéfice : enrichissement par le contact avec l’autre des propres capacités de chacun, et amélioration substantielle du résultat du travail de la classe (on est plus intelligent à plusieurs !)… L’espace pédagogique est d’ailleurs le lieu privilégié de valorisation des formes d’intelligences par la volonté d’exposer, d’afficher sur des fils aériens les productions des élèves.

Coin de décompression


Mais ce n’est pas gagné ! On devine les difficultés liées à cette double démarche… D’abord le non-conformisme de la méthode, en attendant que nous puissions l’étendre à d’autres classes de l’établissement ; puis la difficulté de régler les rapports sociaux (comportements de domination, comportements antisociaux), en instaurant des rôles pour chacun ; modification fondamentale du statut du professeur, aménagement des locaux…
Sur ce seul dernier point, finis bien sûr nos vieux et beaux bureaux en bois ciré, vissés au sol ! La classe est disposée en îlots de tables et de chaises à roulettes : il faut pouvoir successivement se mettre en ordre de bataille pour le travail en groupe, ou pour un projet commun à la classe, voire même pour des temps de décompression nécessaires pour se reprendre au niveau émotionnel.
Un résultat est déjà acquis, des élèves heureux et le plaisir d’enseigner pour les professeurs engagés dans ce projet… Plaisir fondé sur la certitude de tout mettre en œuvre pour que l’avenir, même si l’on en connait pas la forme, voir nos élèves, futurs adultes, prêts à s’adapter, à inventer leurs propres conditions de vie et à prendre en charge les mutations sociales et culturelles de leur temps.


Béatrice PALOU
(Paru dans Présence Mariste N° 274 Janvier 2013)

Les réseaux sociaux

Près de la moitié de nos jeunes sont connectés à au moins un réseau social… C’est un fait ! Et il est en expansion !
Notre école ne peut ignorer cela, et encore moins s’y opposer… Cette réalité a été le sujet d’une journée de réflexion de nos établissements maristes, dans le courant de l’année 2011-2012, et elle reste au centre de leurs préoccupations.
Comme l’indique l’enquête CNIL dont nous reproduisons quelques extraits ci-contre, ce nouveau mode de fonctionnement, s’il n’est pas sans risque, n’en est pas moins la manifestation d’une vie sociale externe à l’école. Et l’école, qui se veut communauté éducative, ne peut pas rester indifférente. Parmi toutes les réflexions que suscite le parallélisme de ces deux modes de relations, deux peuvent être soulignées.

Un lieu de socialisation

L’école est un des rares lieux de socialisation qui reste obligatoire, sinon le seul ! Il faut militer pour que, même avec une évolution exponentielle des techniques de l’information, elle reste ce lieu où l’on se retrouve réellement, sans choix exclusif de ses relations, sans ségrégation sociale, avec des guides et des contraintes d’apprentissage, une éducation au vivre ensemble, et un sens donné à tout cela… Il n’est pas question d’envisager la disparition de l’école telle qu’on la connait aujourd’hui, au profit d’un système où tout apprentissage serait à la demande, individualisé, et sans l’intermédiaire ni de groupe, ni de professeurs… On parlait d’« école-sanctuaire ». Ôtons à ce terme son sens exclusif, et accrochons-nous à cette mission…

Apprendre à s’y retrouver dans la multitude des réseaux sociaux !

De nouveaux modes de relations à intégrer

Mais l’école ne doit pas être imperméable aux nouvelles technologies et aux nouveaux modes de relations qu’elles induisent. Les pistes sont nombreuses pour les intégrer à nos projets pédagogiques.

  • L’école est elle-même faite de réseaux sociaux (classe, relation profs-élèves, parents d’élèves, anciens élèves…). Amplifions la numérisation de ces relations, déjà amorcée dans nos établissements.
    Comment réagissons-nous ?
  • La concrétisation des idées développées par Idriss Aberkane (page suivante) : « ludifier » les apprentissages ! Y introduire le plaisir d’apprendre ensemble. Rééquilibrage essentiel entre l’attrait de l’école et des réseaux sociaux !
  • L’utilisation, autant que faire se peut, des nouveaux moyens techniques (vidéoprojecteurs, tableaux numériques, et autres innovations à-venir…)
  • La prise en compte que la majorité des connaissances de nos élèves ne vient plus du professeur… et qu’il faut donc inclure dans le processus d’apprentissage toutes les dimensions de la vie, y compris celles développées dans les réseaux sociaux… C’est à terme une inversion du type magistral… mais pourquoi pas !

De tout temps, l’école a tiré la société ! Sauf aujourd’hui ? Non bien sûr. Attachons-nous à ce que l’école d’aujourd’hui prépare la société de demain. Et que l’école de demain prépare celle d’après demain….


Michel DUCHAMP
(Paru dans Présence Mariste N° 274 Janvier 2013)

Près de la moitié de nos jeunes sont connectés à un réseau social…

  • 48 % des enfants de 8-17 ans sont connectés à un réseau social (Facebook).
  • 18 % des moins de 13 ans sont déjà connectés, et leurs parents sont au courant à 97 %.
  • Le déclic a lieu au collège : 57 % des élèves du collège sont connectés/11 % des élèves du primaire.
  • Les jeunes se connectent souvent seuls : depuis leur ordinateur personnel (50 %) et leur mobile (23 %).
  • Pour les enfants et les adolescents, la relation sur le réseau n’est pas virtuelle. Ils sont dans la vraie vie ; 92 % utilisent leur vraie identité et livrent beaucoup d’informations personnelles.
  • Leurs activités sont notamment les commentaires et la publication de photos (surtout pour les filles à 88 %).
  • Ils ont en moyenne 210 « amis » (un chiffre qui augmente avec l’âge), 30 % d’entre eux ont déjà accepté en « amis » des gens qu’ils n’avaient pas rencontrés pour de vrai.



Enquête de la CNIL de juillet 2011
Pour avoir accès à la totalité des résultats : http://www.cnil.fr/la-cnil/actu-cnil/article/article/reseaux-sociaux-quelles-sont-les-pratiques-de-nos-enfants-quel-est-le-role-des-parents/

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