Offrir autre chose à Saint-Pourçain

Des initiatives originales existent au Collège N. D. des Victoires pour porter une attention plus grande aux élèves en difficulté. (Présence Mariste n°275, avril 2013)

Certains élèves ont des difficultés dans le domaine scolaire. Le découragement à la vue des résultats, mais aussi une perte de confiance et une mauvaise image d’eux-mêmes contribuent à ne pas améliorer leur situation. Les choses n’ont pas de sens pour eux et il faut leur en donner pour qu’elles soient pleinement vécues. Avec l’équipe enseignante, nous sommes arrivés à la conclusion que ces élèves ont des talents, des intelligences ne pouvant s’exprimer dans un cursus classique, mais si le contexte est différent, pour un temps dans la semaine, ils sont capables de révéler une autre facette de leur être, de gagner du terrain dans l’estime de soi.

Nous avons donc travaillé sur des activités diverses en nous appuyant sur l’accompagnement éducatif. Basées sur le volontariat, ces activités sont encadrées par un ou plusieurs enseignants. Il faut établir des règles communes de fonctionnement : pas de note d’évaluation ; seule, la réalisation sera prise en compte. Il est important de prendre en compte les savoir-faire, les savoir-être et aller jusqu’au bout du projet. Le résultat doit être visible de tous : des élèves, des enseignants, des autres. Étant basées sur le volontariat, ces activités n’engendrent aucune obligation mais, si on s’engage, c’est pour l’intégralité du projet.

Les trois quarts des élèves bénéficient du transport scolaire. Ces activités doivent donc être intégrées dans l’emploi du temps de la journée mais en les situant en fin d’après-midi. Le temps de présence dans l’établissement a augmenté. J’ai donc demandé au Conseil Général de l’Allier une modification des horaires de ramassage qui a été acceptée. Des heures et des moyens ont été demandés au Rectorat. Ils n’ont pas toujours été à la hauteur des attentes mais, il faut souligner le désintéressement de certains enseignants.

Il n’est guère important de décrire par le menu l’intégralité des activités proposées. Deux exemples sont suffisants pour témoigner de l’esprit.

Apprendre à cultiver son jardin et à cultiver sa vie

Le jardinage

C’est un moment particulier dans la semaine où les élèves et des enseignants se retrouvent dans un contexte bien différent de celui d’un cours classique. Là, pas de note, pas de révision. Chacun apporte ce qu’il a récolté comme informations pour les mettre à disposition, au profit des autres. Le parc de l’établissement a semblé l’endroit idéal pour l’équipe pédagogique. Nos élèves vivent dans un monde rural sans appartenir obligatoirement au monde agricole mais chez nous, la terre est un symbole fort.

Les élèves ont choisi de travailler sur des jardinières. Ils ont planté des bulbes ou semé des fleurs afin que celles-ci embellissent notre cadre de vie le plus longtemps possible. Mme LIVEBARDON, professeur de SVT, apporte ses connaissances pour le choix des végétaux. Elle est accompagnée dans cette activité par Mme SIMON, professeur de français, qui a « la main verte ».

Détail floral, gage de patience…

Nous avons aussi décidé de créer un chemin botanique en répertoriant les différentes essences d’arbres qui se trouvent dans le parc. Des petits panneaux seront créés et ils porteront le nom vulgaire et le nom latin de chaque arbre ou arbuste. C’est l’occasion de s’approprier notre cadre de vie, d’en révéler les richesses et de les faire découvrir aux autres. Cette activité conjugue la théorie et la pratique. Les élèves travaillent en petites équipes, chacune ayant la responsabilité d’un espace. On peut parler, on peut échanger, on peut montrer son savoir dans un domaine. C’est un lieu et un temps d’échanges, une parenthèse dans la semaine. On apprend à se connaître, on donne une autre image de soi.

C’est une école de patience bien éloignée des poncifs de notre vie moderne. Il faut attendre que ça pousse. On est loin du « je veux tout, tout de suite ». Apprendre à cultiver son jardin comme on cultive sa vie, sans précipitation, en lui apportant les éléments nécessaires pour qu’elle soit belle, pleine et éternellement tournée vers les autres.

Si le jardinier trouve des satisfactions à cultiver son jardin, celui qui le regarde, éprouvera des plaisirs aussi grands : les exclamations des visiteurs témoignent du résultat. Lors des portes ouvertes, nos jardiniers en herbe ne sont pas peu fiers de répondre : « C’est nous qui avons fait cela ». Tout un symbole !

Vue d’ensemble d’une réalisation des « petits jardiniers » au moment de Pâques.

L’accompagnement des petits

Au début de l’année scolaire, je suis allé voir les élèves de 3e qui avaient des heures d’étude. Je leur ai demandé s’ils avaient un peu de temps à consacrer à des élèves de l’école primaire pour les aider dans leurs devoirs. En amont, j’avais rencontré la directrice et les enseignantes de l’école primaire et leur avait fait part de ce projet. Plus de la moitié des élèves de 3e ont répondu présent. Chaque semaine, pendant une heure, sans faillir une seule fois, ces élèves ont fait lire, réciter les leçons à des enfants. Les regards avaient changé : les petits étaient attentifs et les plus grands d’un sérieux à toute épreuve. Je n’avais pas choisi ces élèves de 3e pour leur niveau scolaire, mais ils s’étaient choisis par leur disponibilité.

Les parents ont eu vent de cette initiative et ont été ravis. L’image de ces adolescents souvent déstabilisés et déstabilisants avait été transformée. Une nouvelle fois, des liens entre le collège et l’école primaire se tissaient. C’est aussi pour ces élèves une manière détournée de pratiquer les valeurs contenues dans l’Évangile. Ils n’en ont pas conscience ou, par pudeur, ils ne veulent pas en prendre conscience. La terre est souvent bonne et, quand elle est bien travaillée, elle offre une belle récolte.

D’autres exemples pouvaient être pris à travers la chorale, l’atelier artistique, l’association sportive de l’établissement mais nous aurions trouvé la même ligne, les mêmes engagements. Sans oublier les fondamentaux qu’apportent les enseignements classiques, ces activités leur donnent du volume. Les champs d’exploration deviennent plus vastes et ils donnent du sens car ils font appel à toutes les formes d’intelligence de l’individu : le corps, le cœur, l’esprit et l’intellect se mobilisent pour devenir créatifs.

L’accompagnement des élèves du primaire par des collégiens, beau chemin d’Évangile.
Jean-Michel FAURE, Directeur
(Publié dans « Présence Mariste » n°275, avril 2013)

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