La loi de 2005 : scolariser les élèves handicapés : enjeux et perspectives

Pour bien comprendre la loi de février 2005

La place des personnes handicapées dans la société française se devait d’être très nettement améliorée et ce, dans tous les domaines : accès à l’emploi, scolarisation, droit à la compensation, accessibilité immobilière… C’est pourquoi en février 2005 [1], une loi fondatrice d’un nouveau projet de société, impose avec force et justesse une véritable participation de tous les citoyens, y compris handicapés, à la vie de la Nation.

Il y a plusieurs façons de lire une loi et ses articles. Le propos de cet article est plutôt de mieux en comprendre la philosophie et ce qui se cache derrière le texte lui-même.

Une loi… des concepts nouveaux

La loi dont il est question prend appui sur les concepts et démarches anglo-saxonnes en vigueur dans plusieurs pays européens. Notamment autour de la notion d’école inclusive et de celle des besoins éducatifs particuliers.

En effet, le projet d’une société inclusive est d’aller au-delà de la simple intégration et d’imposer à l’environnement scolaire ou de travail, l’idée de s’adapter à la personne handicapée. Il s’agit donc pour le milieu qui accueille de penser les adaptations et non pas à la personne de s’adapter ; et cela est déjà en soi une première révolution culturelle.

Le concept de besoins éducatifs particuliers apporte la dimension de la reconnaissance des besoins de la personne et celle de l’obligation de l’État à trouver les compensations liées aux besoins.

Importance de bien connaître la philosophie de la nouvelle loi

La loi précise d’une manière non négligeable la définition du handicap, mettant aussi l’accent sur la notion de situation qui peut handicaper. Prenons, par exemple, une personne en fauteuil roulant se rendant à la mairie pour voter. Elle entre et lit le panneau « bureau de vote au premier étage », il n’y a pas d’ascenseur… Il est, bien sûr, facile de dire que cette personne est handicapée et que c’est justement pour cela qu’elle ne peut pas voter… Ou bien de penser que si le bureau de vote était au rez-de-chaussée, elle n’aurait pas à vivre cette situation de handicap, en votant comme tout le monde.

À travers cet exemple, on peut mesurer combien la loi sur l’égalité des chances nous demande de penser autrement notre quotidien. Autant dire qu’il est bien question de changement, voire de révolution culturelle.

Pour le système scolaire, tous ces concepts le mettent d’emblée sous tension ; car il s’agit de prôner l’école inclusive dans un système éducatif qui produit de l’exclusion… et de repérer les besoins, alors que la culture dominante pointe les manques !

Autant dire que le défi est de taille ! Nous sommes en 2010 ; les pratiques des établissements nous montrent combien il reste à faire, mais surtout combien nous progressons.

Une loi… et des histoires de rampes d’accès

Au cœur des classes primaires ou secondaires, la loi se traduit par la présence d’une très grande hétérogénéité des élèves et, légitimement, les enseignants se posent des questions et cherchent des solutions. Bien souvent, lorsqu’on aborde la question du handicap, cela se traduit par « quel accès immobilier ? ». Or, dans une classe, la première démarche est surtout de pouvoir penser les rampes d’accès aux savoirs. C’est, certes, le travail de tout enseignant de penser l’itinéraire pédagogique qui va permettre à tous les élèves d’entrer dans les apprentissages mais est-ce bien la réalité pour tous les groupes classes ?

Dans une école, la scolarisation d’élèves handicapés permet de faire progresser tous les élèves

Autrement dit, la scolarisation des élèves en situation de handicap permet, nous le constatons régulièrement, de faire progresser tous les élèves. Elle profite à tous, car l’enseignant cherche des voies possibles et, finalement, s’interroge pour chacun de ses élèves, handicapés ou non.

Un autre point est en progrès et va de pair avec les rampes d’accès aux savoirs : il s’agit de l’ambition pédagogique. Pour les élèves handicapés, il faut parfois sortir d’un certain « occupationisme » et avoir, pour eux et avec eux, de l’ambition mesurée, mais de l’ambition.

Une loi… et des valeurs qui résonnent

L’Enseignement Catholique n’a pas attendu cette loi pour scolariser les élèves en situation de handicap. De nombreux établissements ont inventé, avant que cela ne soit obligatoire, des accueils d’élèves autistes, trisomiques… Avec l’aide des familles et de certaines associations, des classes spécialisées ont ainsi vu le jour. En 2009, l’Enseignement Catholique a doublé son nombre d’UPI et s’engage dans une politique de développement des postes qui permette de répondre à des besoins éducatifs particuliers.
Le développement des UPI en lycée professionnel montre notre volonté d’offrir des parcours scolaires allant jusqu’à une qualification ou une attestation de compétences. (80 % des adultes handicapés n’ont pas de qualification professionnelle ; des milliers d’entre eux n’ont jamais eu accès à des possibilités de qualification).

D’après la nouvelle loi, c’est d’abord au milieu qui accueille de s’adapter à la personne handicapée et non l’inverse

Le projet de l’Enseignement Catholique porte haut et fort l’accueil de tous et, en particulier, de ceux qui peinent et des moins chanceux. Nos valeurs réaffirmées par la démarche des Assises de l’Enseignement Catholique, initiée par Paul Malartre, résonnent de manière particulière avec la démarche de la loi de 2005.

En effet lorsque nous affichons « Une école de toutes les intelligences »… N’est-ce pas là, une place pour tous ceux dont l’intelligence n’est pas conventionnelle ?

« Une école sans mur »…
La scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers induit des partenariats nombreux avec d’autres professionnels, notamment ceux du milieu spécialisé. Une scolarité devient avant tout un parcours scolaire ; bien souvent, dans ce cas, atypique, les murs de l’école sont repoussés.

« Risquer l’inattendu de la personne »…
fait écho à la rencontre de tous ces élèves différents qui nous bousculent et nous interpellent.

Chaque résolution des Assises pourrait ainsi être relue ; c’est dire la force du message initial. Chacun, de là où il est, peut se sentir responsable de cet héritage que nous continuons, au travers de la loi de 2005, à faire vivre pleinement.

Françoise MAINE
(SGEC) Mission Besoins Éducatifs Particuliers
(paru dans Présence Mariste N° 262, janvier 2010)

[1Loi 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

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