La Bible : une histoire d’appels à se mettre en route

Les appels de Dieu à travers toute la Bible. (« Présence Mariste » 257, octobre 2008)

La vie du croyant est une marche, qui répond à un appel. Qui suit le maître bien-aimé est tout entier tendu vers la rencontre avec lui.

Cet appel peut signifier arrachement, séparation, renoncement…

C’est un arrachement aux liens les plus forts que le Seigneur demande à Abraham : « Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, pour le pays que je t’indiquerai. » (Gn 12 1)
Abraham quitte donc Haran, ville de Haute-Mésopotamie, tête de ligne de pistes caravanières, pour un pays qui lui était inconnu, le pays de Canaan.

L’appel de Dieu signifie séparation, départ, renoncement


Pour répondre à l’invitation à marcher à sa suite, les disciples de Jésus doivent aussi tout quitter (Mt 1, 18-20). Lorsqu’ils sont envoyés en mission, ni valise, ni sac-à-dos : « Ne prenez rien pour la route, ni bâton, ni sac, ni pain, ni argent ; n’ayez pas chacun deux tuniques. » (Lc 9 3)
Le maître, d’ailleurs, ne donne-t-il pas l’exemple ? Ne ressemble-t-il pas, plutôt qu’à un rabbin bien installé, à un « sans-domicile fixe ». « Les renards ont des terriers et les oiseaux du ciel des nids ; le Fils de l’homme n’a pas où poser la tête. » (Lc 9, 58) N’est-il pas toujours en marche, tendu vers l’avant, refusant tout regard en arrière : « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le Royaume de Dieu. » (Le 9 62)
Jusqu’à la dernière montée vers Jérusalem, qui sera la montée vers la croix et la résurrection, tout tendu vers le but unique, l’accomplissement du dessein d’amour de son Père ?

Mais cette mise en route permet de nous libérer de nos esclavages

C’est le sens du terme « exode », du grec « chemin hors de », qui peut être une image de la vie spirituelle. Dieu fait sortir Israël d’Égypte. C’est un chemin de libération, libération de la tyrannie de Pharaon, des travaux forcés, autant d’images des esclavages qui aliènent notre cœur, des idoles qui l’occupent.

Le « désert » temps d’épreuve mais aussi de rencontre avec Dieu


Le chemin de l’Exode vise à faire de ceux qui le parcourent des hommes libres, libérés pour le service de Dieu : « Quand tu auras fait sortir le peuple d’Égypte, vous servirez Dieu sur cette montagne. » (Ex 3,12). Lorsque Jésus dit au paralytique de la piscine de Bethzatha : « Lève-toi, prends ton grabat et marche ! », n’est-ce pas à cette libération qu’il l’invite, libération de tous les esclavages intérieurs qui le retiennent au sol ?

Cependant cette marche à laquelle le Seigneur invite le croyant est aussi le temps de l’épreuve, des doutes…

Après trois jours de marche dans le désert de Shur, les fils d’Israël, ne pouvant boire l’eau trop amère de Mara, murmurent contre Moïse. Arrivés dans le désert de Sin, ils murmurent de nouveau, regrettant même le temps de leur esclavage en Égypte quand « (ils étaient) assis auprès de la marmite de viande et (mangeaient) du pain à satiété. »
Il nous arrive en effet d’avoir du mal à nous libérer de notre Égypte intérieure, de l’accoutumance à nos servitudes et, comme Pierre marchant sur les eaux, nous nous mettons à douter : « Pierre, descendu de la barque, marcha sur les eaux et alla vers Jésus. Mais, en voyant le vent, il eut peur et il s’écria : Seigneur, sauve-moi ! » (Mt 14,29-30)
Dans cette marche que nous avons entreprise à l’appel du Seigneur, notre foi est mise à l’épreuve. Peur de l’inconnu : « J’ai tellement peur, si atrocement peur », écrit Mère Térésa, lorsqu’elle commence à réaliser son œuvre. Plus tard elle évoque « les ténèbres profondes et la désolation » dans lesquelles elle se trouve, parlant de sa “solitude” comme d’une « compagne de route », mais aussi de « cette foi aveugle qui (la) porte ».

Si le Seigneur nous invite à partir, il nous propose un chemin

C’est lui qui trace le chemin et il arrive que celui-ci nous surprenne. Elie était bien sûr de lui, lorsqu’il égorgea les 450 prophètes de Baal, sûr de lui et de son Dieu, un Dieu de l’ouragan et du tonnerre. Mais, pour sauver sa vie menacée par la volonté de vengeance de Jézabel, il s’enfuit au désert. Il marche, puis s’arrête, dégoûté de lui-même, désireux d’en finir. C’est là que le Seigneur l’attend (1R 19) et se fait découvrir tout autre que celui en qui Elie croyait. Il est le Seigneur qui se rend présent dans « le bruit d’une voix de fin silence » (1R 19,12) et c’est ce nouveau visage de Dieu qu’Elie devra désormais porter à Israël.

Or, ce chemin, quelque monotone, aride ou difficile qu’il soit, est essentiellement celui du bonheur et de la vie

« Vois : je mets aujourd’hui devant toi la vie et le bonheur, la mort et le malheur, moi qui te commande aujourd’hui d’aimer le Seigneur ton Dieu, de suivre ses chemins (…) Tu choisiras la vie pour que tu vives, toi et ta descendance. » (Dt 30,15-20)<

Ce chemin proposé par Dieu est celui du bonheur et de la vie

C’est la Torah, la Parole de Dieu, qui indique à Israël le chemin qui conduit à la vie. Avec Jésus, ce chemin n’est plus la Loi, mais sa propre personne. « Je suis le chemin, la vérité et la vie. »(Jn 14,6) En lui se fait notre Exode, c’est en lui que nous devons marcher en suivant la voie de l’amour : « Je vais vous indiquer un chemin infiniment supérieur. Quand je parlerais en langues, celle des hommes et celle des anges, s’il me manque l’amour, je suis (…) une cymbale retentissante… » (1Co 12,31-13,13).

Mais cette marche puise sa force dans les temps de repos auxquels invite le Seigneur

Repos du sabbat, repos pour les jambes fatiguées du pèlerin et du missionnaire : « Venez à l’écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu. » (Mc 6 31), repos où ils se nourrissent du Pain de la Parole et du Pain Eucharistique, repos de la prière où, comme l’argile entre les mains du potier, ils se laissent modeler par leur créateur.

Ainsi, tout est mouvement, marche en avant, dans la vie chrétienne. Lorsque Jésus nous dit : "Viens, suis-moi." (Mt 5 18), c’est pour nous envoyer en mission auprès de nos frères.
"Ne me retiens pas ! (…) va trouver mes frères et dis-leur que je monte vers mon Père qui est votre père." (Jn 20,17) dit Jésus ressuscité à Marie de Magdala. A Pierre il dit : « Pais mes brebis. » (Jn 21 17) en ajoutant « Suis-moi », non sans l’avoir averti que cette marche derrière lui risquait de le conduire au don de sa vie : « Tu étendras les mains et c’est un autre qui nouera ta ceinture et qui te conduira là où tu ne voudrais pas. »

Seigneur, je cherche ton visage…

Dynamisme de cette marche qui porte l’Évangile au monde et qui est en même temps tout entière tendue dans l’espérance de l’approche du Seigneur bien-aimé. « Viens, Seigneur Jésus ! » , telle est la dernière prière de l’Apocalypse, qui clôt le livre de la Parole de Dieu.

Odile PONTON
(Publié dans Présence Mariste n°257, octobre 2008)

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