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La joie parfaite ou la vraie joie

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La quête du bonheur est aussi celle de François et de ses frères : déterminer ce qu’est la vraie joie est une recherche, un chemin, un déplacement. (Présence Mariste n°298, janvier 2019)

Joie qui n’est pas synonyme de facilité et qui n’exclut pas le renoncement,
avec François d’Assise. Joie qui nous anime.
F. Marcel Durrer, ofm cap

Tout le monde cherche le bonheur, la réussite, la joie. Une chanson a fait le tour du monde entier : I am happy. Cependant notre monde est caractérisé par le fait qu’aujourd’hui être heureux, avoir de la joie est de la responsabilité de l’individu. Les librairies regorgent de livres de recettes pour y parvenir. Malheur à ceux qui n’y arrivent pas ! Cette responsabilité peut être source d’angoisse, car si on n’y arrive pas, c’est qu’on a fait « tout faux », que l’on est un incapable voire un impuissant.

Dans les sources de la spiritualité franciscaine, un récit fait référence dans ce domaine, celui dit de la joie parfaite ou de la vraie joie :

"Le même [frère Léonard] rapporta au même endroit qu’un jour, à Sainte-Marie, le bienheureux François appela frère Léon et dit :
Frère Léon, écris.
Et lui répondit :
Voilà, je suis prêt.
Écris, dit-il, quelle est la vraie joie. Un messager vient et dit que tous les maîtres de Paris sont venus à l’Ordre. Écris : ce n’est pas la vraie joie. De même, tous les prélats d’outremonts, archevêques et évêques ; de même, le roi de France et le roi d’Angleterre. Écris : ce n’est pas la vraie joie. De même, mes frères sont allés chez les infidèles et les ont tous convertis à la foi ; de même, j’ai de Dieu une telle grâce que je guéris les malades et fais beaucoup de miracles : je te dis qu’en tout cela n’est pas la vraie joie.
Mais quelle est la vraie joie ?

St François d’Assise

Je reviens de Pérouse et, par une nuit profonde, je viens ici et c’est le temps de l’hiver, boueux et à ce point froid que des pendeloques d’eau froide congelée se forment aux extrémités de ma tunique et me frappent sans cesse les jambes, et du sang coule de ces blessures. Et tout en boue et froid et glace, je viens à la porte, et après que j’ai longtemps frappé et appelé un frère vient et demande : « Qui est-ce ? » Moi je réponds : « Frère François. » Et lui, dit : « Va-t’en ! Ce n’est pas une heure décente pour circuler ; tu n’entreras pas. » Et à moi qui insiste, à nouveau il répondrait : « Va-t’en ! Tu n’es qu’un simple et un illettré. En tout cas, tu ne viens pas chez nous ; nous sommes tant et tels que nous n’avons pas besoin de toi. » Et moi je me tiens à nouveau debout devant la porte et je dis : « Par amour de Dieu, recueillez-moi cette nuit ! » Et lui répondrait : « Je ne le ferai pas. Va au lieu des Croisiers et demande là-bas. » Je te dis que si je garde patience et ne suis pas ébranlé, en cela est la vraie joie et la vraie vertu et le salut de l’âme."

La quête du bonheur est aussi celle de François et de ses frères. Dans le récit, le jeu d’aller et retour de questions réponses tout en dénonçant les impasses, les verbes de mouvement, donnent peut-être une première clef de sens : déterminer ce qu’est la vraie joie est une recherche, un chemin, un déplacement. En ajoutant au mot joie l’adjectif « vraie » ou « parfaite », le récit nous montre qu’il ne s’agit pas d’un état mais bien d’un chemin de croissance spirituelle. Il raconte aussi qu’il est plus facile de dire ce qu’elle n’est pas, que ce qu’elle est.

F. Marcel Durrer, ofm cap
Assise

(Publié dans « Présence Mariste » n°298, janvier 2019)

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