PM 290

La Gazette de St Chamond du 8 septembre 1816

Interview fictive de Marcellin Champagnat
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« J’étais tranquille dans ma campagne de Marlhes, quand un prêtre est venu bouleverser tout cela ! » Au séminaire, quand nous parlions du projet de Société de Marie, je leur cassais la tête en insistant : « Il faut des frères (donc des laïcs) pour le service des jeunes » (Présence Mariste n°290, janvier 2017)

F Jean-Louis Vialaton

En ce matin du 8 septembre, fête de la Nativité de la Vierge Marie, nous avons pu poser quelques questions au jeune Abbé Marcellin Champagnat, à la sortie de la messe du matin. C’est avec grand intérêt que nous vous livrons le contenu de cette rencontre assez étonnante !

Gazette : Vous célébrez la messe très tôt ! Quelle idée, pour un jeune prêtre comme vous, qui vient d’arriver sur la paroisse de La Valla ?

Marcellin Champagnat : Mon cher, vous n’imaginez même pas tout le travail qui m’attend !

Gazette : Ben justement j’aimerais bien le savoir ! Je suis là pour ça ! Confiez-nous vos découvertes ! Vous êtes arrivé quand ?

MC  : Il y a peu de temps ! J’ai été ordonné prêtre le 22 juillet dans la chapelle du Grand Séminaire St Irénée ; le lendemain, avec mes 11 confrères nous avons promis à la Bonne Mère de créer la Société de Marie, là où l’évêque nous enverrait ! Je suis arrivé il y a un peu plus d’un mois au presbytère de La Valla ! Vous voyez : c’est du rapide ! Notre évêque n’a pas envie de nous voir « refroidir » (dit-il en éclatant de rire !)

Ga  : Je vois que la tâche ne vous effraie pas, votre enthousiasme fait plaisir à voir ! Ben justement, en quelques semaines, vous avez pu observer la paroisse : quelles sont vos impressions ?

MC : La paroisse est immense (il fait de grands gestes) : même le hameau du Bessat en fait partie ! C’est vous dire ! Les paroissiens sont de bons marcheurs ! Tous ceux que j’ai déjà rencontrés, sont de braves gens ! Certains m’ont confié leurs difficultés à vivre, dans ces coins de montagne, d’autres ont la foi chevillée au corps et sont prêt à prier davantage ! Mais je ne vous cache pas que mon plus grand souci, ce sont les enfants et les jeunes du secteur !

Ga : Ah bon ? Ils n’ont pas de travail ? Ils sont dans la misère ?

MC : Le travail ne manque pas ! A la campagne il y a toujours à faire ! Non ! Ce qui me chagrine, c’est le manque d’intérêt qu’ils suscitent !

Marcellin, un homme plein de bonté
Photos archives FMS

Ga : Que voulez-vous dire ? C’est intéressant ! Précisez votre pensée !

MC : En dehors du travail, ils sont livrés à eux-mêmes ! Leur instruction est proche de zéro, quant à leur formation religieuse et spirituelle, elle s’en approche aussi ! Quand je vous dis qu’il y a du pain sur la planche !… (dit-il en riant).

Ga : Quelle est votre histoire à vous ? Vous venez d’où ?

MC : Oh ! Ce sera vite fait ! Je viens du même terreau que tous ces gamins dont je vous ai parlé ! J’ai passé peu de temps à l’école ! Si ma tante ne m’avait pas enseigné des tas de choses … je ne serais pas là ! J’étais tranquille dans ma campagne de Marlhes, quand un prêtre est venu bouleverser tout cela (il rigole encore !) Malgré mes ignorances, j’ai fait le séminaire : quand Dieu vous tient ! J’ai même trouvé un plus nul que moi : Jean-Marie, le curé d’Ars, à l’autre bout du diocèse …

Ga : Je ne connais pas !

MC  : Vous devriez ! Un saint homme ! Vous allez en entendre parler ! Allez donc lui poser des questions !…

Ga : Vous êtes le vicaire du curé Rebot ! Tout se passe bien ? Ces derniers mois on ne le voit guère !

MC : Effectivement, il n’est pas toujours en bonne forme. Je dois souvent le remplacer. Depuis mon arrivée, j’ai fait presque tous les baptêmes, mariages, enterrements de la commune ! Mais je ne m’en plains pas ! Comme ça, je rencontre les paroissiens ! J’apprends à les connaître !

Ga : Vous voilà jeune prêtre dans ce coin retiré. Vos années de séminaire à Lyon, ça vous aide bien dans votre ministère ?

MC : Bien entendu ! Je vous ai dit d’où je viens ! Je n’étais pas une lumière (il rit encore !) J’ai beaucoup appris !

Ga : Vous pouvez être plus précis ?

Une mission dans un pays de monts et de forêts

MC : Je passe sur les programmes de Philosophie et de Théologie, qui sont les fondements … Ce qui m’a le plus marqué, c’est la formation spirituelle que vous avons reçue : chacun est bien armé pour vivre pleinement son sacerdoce et pour partager tout cela avec ceux que le Seigneur nous envoie ! J’ai aussi beaucoup apprécié les petites réunions de prière et de partage, au séminaire ! Nous étions nombreux, et ces rencontres nous construisaient les uns les autres.

Ga : Vous éveillez ma curiosité ! Dites m’en un peu plus !

MC : En fait, c’est la Bonne Mère qui nous réunissait ! Nous étions nombreux à désirer qu’elle ait sa « Société » ! Nous en parlions, et surtout nous avons beaucoup prié ! Si ça marche, c’est Elle qu’il faudra féliciter !

Ga : Vous voilà maintenant bien loin de vos amis ! Tout cela va sûrement vous manquer !

MC : Ça ne risque pas ! Nous avons prévu de nous retrouver ! Et puis, vous avez vu : je ne m’ennuie pas ! J’ai déjà repéré 2 ou 3 jeunes garçons qui en veulent un peu plus ! On en reparlera un de ces jours ! Au séminaire, quand nous parlions du projet de Société de Marie, je leur cassais la tête en insistant : « Il faut des frères (donc des laïcs) pour le service des jeunes » ! On verra bien ! En tous cas, dites bien à vos lecteurs : si ça marche, c’est Marie qu’il faudra féliciter ! Vous m’excusez, on en reste là, j’ai 3 personnes à confesser !

Ga  : Merci de m’avoir donné un peu de votre temps. Je vous laisse à vos paroissiens ! Encore Merci !

Et j’ai laissé ce jeune abbé de 27 ans plein d’énergie, remonter à toutes jambes jusqu’à la sacristie !

F. Jean Louis VIALATON

Connaissez-vous La Valla-en-Gier ?
La commune de La Valla a une population de 1 009 habitants, d’après le calcul fait en 2015. Elle occupe la haute vallée du Gier et tout le bassin du Ban, son affluent. Son territoire est très accidenté. Le point le plus bas est à l’altitude 440 et le plus haut est à 1 434 m. Marcellin Champagnat arrive en 1816, dans une commune peuplée de 2 400 h environ. Mais le territoire communal est plus vaste que maintenant car il comprend aussi celui du Bessat. La présence d’agriculteurs habitant plus d’une cinquantaine de hameaux, était beaucoup plus forte qu’aujourd’hui. Beaucoup de terrains qui ont été boisés ou reconquis par une végétation sauvage, étaient cultivés et travaillés par des paysans avec une traction animale ; et ils étaient bien plus nombreux qu’actuellement ! Des terrains même en pente assez accentuée, pouvaient être travaillés.
F. Jean RONZON
(Publié dans « Présence Mariste » n°290, janvier 2017)

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