Une insigne bienfaitrice des Frères Maristes du Nord

La merveilleuse histoire de la comtesse de la Grandville à qui la Province de Beaucamps doit beaucoup. (« Voyages et Missions » n°86, juillet 1965)

LA COMTESSE DE LA GRANVILLE

NOBLE DAME, INSIGNE BIENFAITRICE, choisie par Dieu pour être l’instrument de ses desseins dans le développement de l’Institut des FRERES MARISTES dans le Nord de la France d’abord, puis en d’autres contrées du monde.

Les origines de Caroline de Beaufort

Caroline de Beaufort naquit à Anvers le 3 janvier 1793 au cours de l’émigration. Elle était la dernière de sept enfants. Son père, le marquis de Beaufort, descendait d’une très ancienne famille ; sa mère Léopoldine de Mérode, était alliée aux Montalembert qui se sont illustrés dans la défense de l’Eglise au XIXe siècle. Un Mérode fut le dernier ministre de l’armée de Pie IX.

Dès qu’il put revenir en France, le marquis de Beaufort s’installa à Nancy. La première enfance de Caroline passée à l’étranger, son éducation se poursuit à Amiens. Confiée aux Sœurs du Sacré-Cœur, c’est Madame Barat elle-même qui se chargea de former Caroline de Beaufort. On sait que cette célèbre éducatrice a été élevée sur les autels depuis.

A l’école d’une sainte

Aux dons naturels de l’élève : intelligence précoce et cœur ouvert aux bons sentiments, s’ajoutèrent les leçons et exemples d’une sainte. Caroline acquit une piété et un enthousiasme pour le bien qui seront plus tard le principe d’œuvres variées.

Le séjour terminé à Amiens, Caroline retrouve Nancy et ses parents. Mais, en 1818, Caroline quitte définitivement la Lorraine, car le 5 août elle épouse le digne Comte Léon Bide de la Granville, dernier rejeton des « de Lauwe » et des « de Flandres », d’une opulente famille établie dans la Flandre française. Madame la Comtesse quitte la bonne Lorraine, non sans regret, pour venir habiter, le 26 août 1818, le château de Beaucamps, petit village de 770 habitants, connu depuis dans tout l’Institut.

LA CHATELAINE DE BEAUCAMPS

Le changement de climat lui fut préjudiciable ; la santé bientôt compromise, le remède conseillé fut l’Italie. Remède agréable pour une artiste aimant passionnément l’Italie et pour une chrétienne qui aimait Rome surtout. Un séjour prolongé lui rendit la santé ; elle n’y perdit pas son temps ,elle étudia les chefs-d’œuvre si nombreux en terre italienne et romaine. A son retour dans le Nord, elle composa deux volumes sur les merveilles contemplées.

En 1827, Madame la Comtesse perd ses parents. Cet événement, tout en brisant son cœur, éclaira sa conscience. Ses goûts naturels l’auraient attirée à Paris, mais ses devoirs la voulaient à Beaucamps.

Son choix fut promptement fait : sur le conseil de Mme Barat, le devoir l’emporta et pour toujours. L’élève de Sainte Sophie Barat apparut alors dans toute sa noblesse. D’ailleurs le Comte de la Granville se fit l’auxiliaire généreux et discret de toutes ses libéralités, autorisées par une fortune considérable.

Monsieur et Madame de la Granville firent bâtir le château de Beaucamps au lieu-dit « Le Grand-Fau », et l’habitèrent. Ce château a été incendié en 1915 et n’a pas été rebâti.

Grâce à leur présence continuelle ils furent les agents d’œuvres nombreuses non seulement pour Beaucamps mais même pour toute la contrée.

La vie intime de la comtesse de la Grandville

Esprit de foi prononcé, charité inépuisable, sainteté touchante, s’alliaient à une trempe virile, voire héroïque, et à la plus exquise sensibilité.
Très cultivée en lettres, arts et langues étrangères, Mlle de Beaufort semblait être appelée à vivre dans une société d’élite. Et la voilà destinée à vivre soit à Lille, soit à Beaucamps, dans la compagnie d’un beau-père, d’une maison livrée à des servantes souveraines et impertinentes, d’un mari opulent mais bien inférieur à elle sous bien des rapports.

Madame Barat devient alors sa confidente, sa conseillère. La jeune comtesse de 25 ans ne recherchait pas le monde, mais le monde la convoitait. Une occasion se présente pour elle d’aller demeurer à Nancy, pour Madame la Comtesse, ce serait une délivrance, mais au jugement de Madame Barat, ce serait une désertion.

Cette souffrance intime brise enfin le ressort. Dès 1823 la santé de Madame la Comtesse est atteinte ; nous le savons déjà, elle part en Italie. Au retour, la solitude de Beaucamps la reprend. Madame Barat soutiendra le courage de son ancienne élève par ses lettres, l’aidera à porter ses croix et l’orientera vers une vie de dévouement, d’oubli de soi, de sainteté.

Impossible de compter ses bienfaits à l’Eglise,
aux pauvres, aux enfants, aux vieillards

Le deuil de ses parents et de sa sœur Pauline marque des étapes douloureuses de sa vie de châtelaine. A la mort de son beau-père, un héritage considérable revient à Monsieur et Madame de Granville. La grâce du Seigneur agissant, Madame la Comtesse portera sa vive intelligence et le dévouement de son ardente nature vers le bien. N’ayant pu avoir d’enfants, elle fit une famille de tous ceux qui souffraient. Impossible de compter ses bienfaits à l’Eglise, aux pauvres, aux enfants, aux vieillards.

Un vaisseau pour Mgr Bataillon,
Mariste, évêque d’Océanie

Son esprit de charité se tourne vers les missions : elle achète un vaisseau pour la navigation des mers de l’Océanie et en fait présent à Mgr Bataillon, Mariste, évêque de ces îles.

Pour donner davantage à ses pauvres, elle se prive même, parfois, de feu en hiver. Elle mène dans son château de Beaucamps, une vie de religieuse. Sans se dérober aux réunions et relations obligées de sa parenté, elle se réserve des heures pour la prière, les lectures, de longues visites devant le Saint Sacrement qu’elle possédait dans une chapelle particulière.

Elle proclamait être redevable de son salut, à sa Mère, ainsi désignait-elle Madame Barat.

Sur les conseils de la Sainte, Madame la Comtesse émit le vœu de pauvreté, autant qu’une personne de sa condition pouvait s’y astreindre, suivant les directives de son confesseur. Un jour, elle répliqua à un Supérieur :
« Mais il faut que je pratique la pauvreté comme un Frère Mariste ! . »

Toute jeune, elle avait reçu de ses parents une robe assez belle convoitée par une amie.
« Donnez-moi un sac de pommes de terre et je vous céderai cette robe ».

Les pauvres bien entendu, en profitèrent. Elle fut rapidement dénommée « Mère des pauvres ». Elle avait l’intelligence du pauvre et aidait l’indigent sans jamais froisser son honneur. Elle répétait :
« C’est un plus grand bonheur de donner que de recevoir »

« Posséder pour offrir »

Sa munificence chrétienne illustre ces pensées, et parlait un langage bien plus éloquent, très souvent connu de Dieu seul.

Gardons-nous bien de parler « parcimonie » en appréciant ses manières d’agir, des détails intéressants, voire naïfs de sa vie. « Si nous avions une belle voix, nous pourrions donner un concert au profit des pauvres », disait-elle à Madame Maisnil. Quelquefois elle se plaignait :
« Ah ! si j’avais 10, 20 fr… je pourrai soulager telle misère ».

Riche à millions de biens fonds, son escarcelle était souvent vide. Il fallait la tromper sur le prix des vêtements exigés par sa condition, sinon elle aurait été moins bien habillée que les pauvres. Elle refusa un châle qui avait coûté 500 francs. Après s’être dépouillée de tous ses bijoux elle vendit les meubles de sa chambre particulière, jugés inutiles. Depuis longtemps malgré un goût prononcé pour les voyages, elle s’interdisait soigneusement tous ceux qui n’étaient pas d’absolue nécessité.
La chapelle de Beaucamps a longtemps possédé un chef-d’œuvre d’art et de patience, composé de milliers de petits morceaux de laine ; elle mit quinze ans pour l’achever.

Les largesses de M. Le Comte

A la mort de Madame la Comtesse, Monsieur le Comte fit connaître qu’il continuerait les largesses de sa dame. Ensemble, à n’en pas douter, ils préparèrent l’avenir de leur patrimoine. Monsieur le Comte de la Granville, avant de mourir, ne laissant pas de descendance, pour continuer les bonnes œuvres inspirées par son épouse — et qui les feront bénir à jamais — distribua ses biens à charge pour les héritiers de continuer de bonnes œuvres : aux écoles de garçons et de filles de Beaucamps, aux pauvres, à l’hospice ; les communautés du Bon Pasteur de Lille de Loos, des bourses pour les juvénistes et novices de Beaucamps, les prêtres infirmes, les sourds-muets de Fives, les Missions des Pères Jésuites, le Séminaire de Cambrai, la pension pour jeunes filles issues de parents nobles déchus, les orphelins des victimes de guerre de Vendée, une rente perpétuelle pour habiller les enfants de la première communion de Beaucamps… Eventail, on le voit, très large, dû à un désir immense de faire le bien.

Que sont devenues ces donations ?

Perdues, dévaluées, oubliées… avec le temps sans doute. Le mérite en reste à leurs auteurs.
Mentionnons encore l’Hôtel de la Monnaie de Lille cédé aux Frères de la Doctrine Chrétienne et, à leur défaut, à l’Evêché.

Si l’espace offert à ces lignes était plus important, il y aurait beaucoup à dire sur les vertus d’obéissance et de chasteté pratiquées par la châtelaine de Beaucamps, à la manière des religieux. Sa dévotion à l’Eucharistie, sa soumission à la volonté de Dieu, son extrême bonté envers tous, mériteraient notre attention.

Chaque année elle se réjouissait de pouvoir assister aux conférences des Supérieurs à la retraite, d’écouter la solide doctrine du Rd Frère Louis-Marie qu’elle admirait à bon droit. A l’issue de la retraite, elle passait de groupe en groupe, saluait, s’intéressait aux placements, aux occupations de chacun, des œuvres d’écoles qu’ils dirigeaient. Si elle méritait d’être appelée « Mère des pauvres », elle était vraiment aussi la « Mère des Frères ».

LA GRANDE BIENFAITRICE

Madame la Comtesse de la Granville devint donc la providence de la région de Beaucamps. Elle commença par s’intéresser à des églises du voisinage ; la révolution avait fait abattre Notre-Dame de Grâce de Loos, slle la fit réédifier en même temps qu’elle faisait réparer plusieurs autres églises paroissiales.

En 1832 le choléra ravage Beaucamps, elle soigne elle-même bon nombre de victimes et établit les Sœurs de l’Enfant Jésus dans un immeuble qu’elle achète et organise à Beaucamps. C’est l’origine de l’école des filles et de l’hospice de Beaucamps.

Le terrible fléau terminé, les Sœurs resteront pour s’occuper de l’éducation des petites filles. Par reconnaissance pour Madame Barat, son ancienne maîtresse, la Comtesse créa à Lille le couvent des Sœurs du Sacré-Cœur, toujours existant a la rue Royale.

Le bel ensemble de Beaucamps (avant sa destruction en 1918)
tel que l’avait voulu la Comtesse de la Granville.

Bientôt elle songera à doter Beaucamps d’une école pour garçons. Elle désirait la confier à des Frères enseignants. Proche de l’église, une maison d’école est construite pour externes et pensionnaires. M. Maisnil, régisseur des Granville fut chargé de trouver une Congrégation qui en prendrait la direction. Il écrivit le 27 septembre 1841 au CF. Andronio, Directeur de l’école de Saint-Pol-sur-Ternoise (P.-de-C.) que Madame la Comtesse avait l’intention de fonder une maison d’éducation pour garçons et, par la suite, de faire don de l’immeuble.

Sans retard, le R. F. François, Supérieur Général des Frères Maristes, mis au courant, accepta la proposition et en novembre 1842, les Frères Cyprien, Gervais et Gélase arrivaient à Beaucamps. Le 9 novembre 1842, l’école ouvre ses portes et 150 garçons se présentent.

Le succès de l’œuvre enchanta la châtelaine ; dès 1844, elle propose le transfert à Beaucamps du noviciat installé à Saint-Pol. Les Supérieurs ayant accepté, aussitôt la maison de Beaucamps est agrandie en vue des nouvelles nécessités.
Le noviciat s’y implante dès 1846 ; les Frères de la région du Nord y firent leur première retraite en cette même année.

A la vue de la modestie, de la piété, du bon esprit des Frères, Madame la Comtesse devine la belle œuvre à réaliser. Le 21 juin 1849, elle exprime par lettre, ses desseins, au Révérend Frère François, en résidence à N.-D. de l’Hermitage près de Saint-Chamond (Loire) :
« II faut organiser fortement la maison, y appeler un aumônier, un Frère Visiteur, lancer le noviciat, le pensionnat… Les ressources ne feront pas défaut et les travaux en cours d’exécution feront de Beaucamps un établissement modèle ».

RENCONTRE MEMORABLE

Le Révérend Frère François, bien que chargé personnellement des sept établissements du Nord, avait été empêché de les visiter en raison de ses occupations et de son état de santé. Il décida de se rendre à Beaucamps le plus tôt possible et y arriva le 17 avril 1850.

Ce fut grande joie quand le Révérend Frère franchit le seuil de la maison de Beaucamps pour la première fois ! Madame la Comtesse était venue partager l’allégresse générale ; il lui tardait de connaître le premier Supérieur des Frères, de même le Supérieur souhaitait faire connaissance de la généreuse fondatrice de Beaucamps.
Ensemble.ils eurent un long entretien. Vivement frappée de l’air de sainteté du R. F. François, la Comtesse déclara :
« Je puis dire maintenant : j’ai vu, jugé, apprécié le Supérieur que Dieu a donné à ses Frères ! ».

A la suite de cette entrevue la grande Dame se montra plus libérale que jamais. Voyant que le personnel de la maison, que le nombre de novices et pensionnaires croissait toujours, elle décida de nouvelles constructions : la chapelle dans la maison manquait notoirement aux novices et aux Frères. Elle voulut bâtir une chapelle qui fut belle. Sa construction demanda deux années : commencée en mai 1853, Mgr Régnier, archevêque de Cambrai, la bénissait en août 1855.

La chapelle achevée, des agrandissements sont poursuivis de 1855 à 1860 et permettent de loger 350 personnes dans l’immeuble. En moins de vingt ans, par ses largesses et son esprit de suite, la Comtesse de la Granville avait élevé un établissement spacieux, dans un harmonieux ensemble, dont la vue panoramique ci-contre donne une idée.

Cette maison allait jouer un rôle important jusqu’en 1903. La persécution alors lui fait subir une éclipse de vingt-cinq ans. Elle reprend vie à partir de 1928 et s’il plaît à Dieu, elle poursuivra longtemps encore une œuvre d’évangélisation à travers un enseignement profane. Pour assurer la survie des œuvres, le Comte et la Comtesse de la Granville fixent d’abord l’avenir de l’école fondée en 1842. Puis, sans compter des largesses pour l’ameublement de la chapelle et de la maison, ils ajoutèrent en 1855 la cession vraiment royale de toutes les constructions élevées à leurs frais, destinées tant au noviciat, qu’au pensionnat et à la Maison provinciale.

Une clause permit de sauver maison
et propriété en 1903

Dans l’acte fait en l’étude de Me Brue, notaire à Radinghem, une clause permit de sauver maison et propriété en 1903 :
« Si pour quelque motif que ce soit, les Frères Maristes étaient forcés de quitter Beaucamps, la aona-tion serait résolue en faveur de Monsieur le Comte et de Madame la Comtesse de la Granville ou de leurs héritiers ».

Ajoutons que la charité des Granville ne se limitait pas à la seule maison ou Province de Beaucamps, discrètement mais généreusement ils s’intéressaient à toute la Congrégation.

La comtesse assiste à une réunion capitulaire

Ces dons valurent à Madame la Comtesse, un double privilège. Le premier fut d’assister, plusieurs années aux conférences données par les Frères Assistants aux retraites de Beaucamps. Le second est plus extraordinaire. En 1854, à l’occasion d’un pèlerinage à N.-D. de la Salette, elle fit une visite à N.-D. de l’Hermitage où le Chapitre Général siégeait. Par une faveur qui ne se répétera probablement jamais, elle assista à une réunion capitulalre, et prit grand intérêt aux détails qui lui furent donnés sur la marche et les progrès de l’Institut.

SES DERNIERES ANNEES

L’inétrêt que Madame la Comtesse portait aux Frères Maristes et aux œuvres de l’Institut ne se démentit jamais. Parmi toutes les œuvres qui l’occupèrent, celles des Frères gardèrent sa préférence. Tout ce qui touchait à l’Institut des Frères Maristes retenait son attention. Quelle joie pour elle quand elle apprit la reconnaissance légale de l’Institut !
« J’irai à N.-D. de Grâce à Loos en action de grâces et demanderai des remerciements avec la même ardeur que j’ai sollicité des prières ».

Inlassablement elle fit des instances pour obtenir un aumônier pour Beaucamps soit chez les Pères Maristes, soit à l’évêché de Cambrai. Dans un post scriptum qui en dit long sur l’intérêt porté aux œuvres des Frères, elle dit :
« Encore un nouveau novice depuis ce matin, leur vue me dilate le cœur ! »

Ainsi le résultat de vingt-trois années de collaboration entre l’insigne Bienfaitrice de Beaucamps et l’Institut des Frères Maristes fut merveilleux.

A sa mort en 1865, la petite école de Beaucamps vivait à côté d’un magnifique pensionnat de 200 internes. Mieux encore, le noviciat fondé en 1846 grâce aux largesses de Madame la Comtesse avait fourni à la Province de Beaucamps un accroissement continu se traduisant par les chiffres suivants : 330 Frères exerçant en 54 établissements et 13.000 élèves.

Rentrant de la Province de Grande-Bretagne où le R. Frère Louis-Marie, Supérieur Général, avait présidé la retraite de Glasgow, il trouvait, à son passage à Beaucamps, la Comtesse sur son lit d’agonie. Elle témoigna grande satisfaction d’apprendre que son œuvre prospérait et que le Saint Siège venait d’autoriser l’établissement des Frères au Cap de Bonne-Espérance.
« De toutes mes œuvres, c’est celle des Frères qui me donne le plus de consolation. Je suis trop heureuse de tout le bien qu’ils font ».

Le Révérend Frère la priant de ne pas oublier les Frères devant Dieu :
« Vous oublier, mon Révérend Frère, oublier mes Frères de Beaucamps, oh jamais ! jamais ! »

Qu’elle n’eût pas été la joie de la pieuse et généreuse châtelaine mourante, si l’avenir avait pu se dévoiler à ses yeux !… La Province de Beaucamps en effet, a été le tronc d’où sont sorties de fortes branches au long des années : la Grande-Bretagne, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Belgique, l’Allemagne, le Brésil méridional sont aujourd’hui de belles et florissantes Provinces.

L’Institut des Frères Maristes a contracté une lourde dette de reconnaissance à l’égard de Madame la Comtesse de la Granville. Il est exact de dire qu’il n’a pas manqué à ce devoir. En effet, chaque génération de Frères, dès son entrée au noviciat, apprend, par la lecture de la vie du Bienheureux Fondateur, la charitable activité de la noble châtelaine. Son nom, sa munificence sont inscrits à jamais dans les documents officiels de l’Institut.

La reconnaissance des Frères Maristes

Les Frères Maristes de la Province de Beaucamps sont particulièrement obligés à une reconnaissance perpétuelle. On peut assurer que personne n’ignore ce qu’a été Madame la Comtesse. Son nom, ses œuvres sont sur les lèvres et dans le cœur de chacun.

Un mémorial le rappelle à l’église du village : l’œuvre des Sœurs, des Frères, l’église paroissiale sont la sienne. Les générations ont gardé, peints sur toile, les portraits de Monsieur le Comte et de Madame la Comtesse de la Granville. Avec les Frères, ces tableaux sont partis en exil en 1903. Rentrés à Beaucamps en 1928, le grand parloir du pensionnat leur assure une place préférentielle, exprimant ainsi d’une manière tangible une reconnaissance perpétuelle.

LES FUNERAILLES DE LA COMTESSE

Fixées au samedi 9 septembre, tout Beaucamps était présent, chaque paroissien pleurait une bienfaitrice. Lille aussi semblait s’être transporté à Beaucamps. D’innom brables calèches circulaient en tous sens. Ce qu’il y eut de majestueusement imposant dans le cortège funèbre c’était le spectacle de 300 Frères Maristes venus à la retraite et qui, heureusement rassemblés, assistaient aux funérailles d’une des plus grandes beinfaitrices de la Congrégation.

Tout au long du parcours le chant du « Miserere » exécute par les enfants de la Maîtrise de Lille, était appuyé par des centaines de voix graves.

Les Frères avaient demandé et obtenu de transporter, un instant, dans leur chapelle, le corps de la défunte, en hommage de gratitude. Impossible de peindre l’émotion de tous pendant cette dernière visite de celle à qui ils devaient et cette magnifique chapelle et cette immense maison, où elle pénétrait pour la dernière fois.

Après cette station dans la chapelle, les restes vénérés de la pieuse Fondatrice furent portés à l’église paroissiale où le service fut célébré par un Vicaire général de Cambrai, assisté de plusieurs autres Vicaires généraux. Une foule considérable remplissait l’église. (Cette église reconstruite, don de la défunte, n’était pas encore complètement plâtrée au jour des funérailles).
Un nombre restreint de Frères put y entrer. Le Révérend Frère Louis-Marie, Supérieur Général et le C. Frère Pascal, Assistant Général, portaient les coins du poêle.

Ses restes placés au chevet de l’église de Beaucamps, dans le mausolée familial, malheureusement détruit par les mines allemandes en 1918, ont disparu dans les décombres. Une plaque de marbre, placée dans la chapelle de gauche au fond de l’église paroissiale de Beaucamps, rappelle aux paroissiens qu’ils doivent leur église et les œuvres d’éducation de Beaucamps à Monsieur et Madame la Comtesse de la Granville.

En ce centenaire de sa mort, il était du devoir des bénéficiaires de la bonne châtelaine, de rappeler son souvenir. Dieu s’est servi d’elle et de sa famille pour susciter de grandes œuvres aux répercussions éternelles. Merci à Dieu pour son constante protection et reconnaissance à jamais à l’insigne bienfaitrice de l’Institut des Frères Maristes que fut Caroline de Beaufort, Comtesse de la Granville.

Beaucamps, février 1965
centenaire de la mort de la Comtesse

(Publié dans « Voyages et Missions » n°86, juillet 1965)

Vos réactions

  • Kayolo 11 mai 2011 14:23

    Bonjour,

    Je suis content de vous lire et je souhaite si vous le permettez obtenir une bourse d’études pour le deuxième cycle en Sciences Commerciales et Financières par vous et pour vous afin d’être toujours au service des autres. Que Dieu vous bénisse !

    Bien à vous Matthieu Kayolo Ngemi

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