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Les ados et leurs héros

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Les collégiens interrogés définissent le héros par trois grands critères : ses actions, ses qualités et son rapport à eux, son rôle dans leur vie. (Présence Mariste n°299, avril 2019)

Cet article est rédigé à partir des réponses données par 131 élèves du collège des Maristes de Bourg de Péage dans la Drôme. 44 élèves de 6e et 87 élèves de 3e ont répondu aux deux questions :
« Qu’est-ce qu’un héros/une héroïne pour toi ? » et « Qui sont tes héros ? ». Les réponses ne sont pas fondamentalement différentes entre les deux niveaux de classe, même si évidemment les formulations sont plus élaborées en 3e.

Qu’est-ce qu’un héros pour les adolescents ?

Marie Agnès REYNAUD

Les collégiens interrogés définissent le héros par trois grands critères : ses actions, ses qualités et son rapport à eux, son rôle dans leur vie. Ils n’ont énoncé parfois qu’une seule réponse dans un seul critère, parfois plusieurs réponses, soit dans un même critère, soit dans deux ou trois critères. (Entre parenthèses vous trouverez le nombre de réponses)

Des actes remarquables

Le héros est d’abord un sauveur de personnes, du monde (71) et un aidant et/ou un protecteur auprès des personnes fragiles, handicapées, âgées (47). Il fait « quelque chose de bien » (12), voire un acte compliqué, extraordinaire (6).
Pour certains élèves, il est celui qui accomplit un exploit pour son pays (7) ou un personnage historique (2). Il est parfois celui qui tue (2) ou qui n’existe que dans le virtuel, mais qui a de bonnes idées (2). Quelques-uns plébiscitent le héros du quotidien (6).

Graphique 01

Des qualités morales

Le héros doit faire preuve de qualités morales. Il est courageux ; il n’a pas peur (26). Il défend ses idéaux malgré le danger, il se bat pour la paix et la justice (18). Il est celui que l’on admire, que l’on respecte et en qui on a confiance (15). Il se démarque des autres par ses (super)pouvoirs (8) et n’hésite pas à sacrifier sa vie pour autrui (8).

Une relation

Pour certains élèves, le héros est celui qui a un lien avec leur vie : il est important ; il les aide par son exemple à accomplir quelque chose qui est difficile et en cela « change un bout de la vie », il aide à « devenir ce que l’on est » (7). Il est quelqu’un de connu que l’on aime ou qui fait rêver (3).

Une définition à enrichir

Thomas PESQUET, personnage admirable, joue avec des macarons dans l’espace à l’heure de son anniversaire

En conclusion, nos jeunes, à eux tous, donnent du héros une définition assez complète et assez proche de celle des adultes. Mais il y manque une dimension qui transcende le héros : l’acte n’est héroïque que s’il est fait pour le bien de toute l’humanité. Et c’est ce plus qui fait que les actes de Daesch, par exemple, ne seront jamais considérés comme des actes héroïques. Frédéric Worms, philosophe et professeur à l’ENS (Ecole Normale Supérieure), codirecteur des « 100 Mots de la République » écrit que « Le héros n’est pas seulement celui qui sacrifie sa vie, mais celui qui le fait pour une cause universelle dans son principe ».

Qui sont les héros des collégiens interrogés ?

D’abord des protecteurs

En 6e comme en 3e, les élèves considèrent leurs parents comme des héros (39 citations au total, soit 35 % des 6e et 27,5% des 3e interrogés) pour deux raisons, parce qu’ils leur ont donné la vie et/ou parce qu’ils sont protecteurs, aidants, rassurants. Les élèves citent ensuite des héros qui sauvent ou qui protègent : médecins, pompiers, policiers, militaires, associations caritatives, Arnaud Beltrame, Mamoudou Gassama (5 citations chez les 6e et 33 chez les 3e).

Graphique 02

Les Sixièmes considèrent parfois comme leur héros un animal familier ou non, parfois imaginaire, qui joue le rôle de « doudou » (8). Ces réponses de jeunes adolescents disent leur besoin de protection. D’après Boris Cyrulnik, neuropsychiatre « Quand on a besoin de héros, c’est parce qu’on se sent faible. Un enfant a besoin de héros, son père, sa mère ou Tarzan. Un héros offre à l’enfance une identification constructive. Normalement cela passe à l’âge adulte. » (Dans l’OBS du 4 avril 2018).

Des personnes admirables

Les élèves décernent également le titre de héros aux personnes qu’ils admirent. Dans la famille proche, il s’agit de grands-parents ou d’arrière grands-parents, d’un oncle, d’une cousine, pour avoir lutté courageusement contre la maladie, pour leurs exploits sportifs ou leurs engagements entre autres au cours des deux guerres mondiales (18). Ont été cités comme héros les soldats lors des guerres (10), des sportifs (14), des musiciens (7). Vingt-huit réponses citent des personnalités appartenant à des domaines et à des époques très variés, parmi lesquelles on trouve des figures plus emblématiques ; j’ai retenu : Vercingétorix, Marie Curie, Martin Luther King, Nelson Mandela, Simone Veil, Thomas Pesquet, Michael Moore, Emma Watson…

Les héros de nos jeunes d’aujourd’hui sont plus souvent des stars médiatiques et porteuses d’un destin individuel. Cependant quelques élèves, de 3e essentiellement, peuvent citer des personnes qui transcendent leur individualité et dont l’histoire devient celle de l’humanité.

Des personnages fictifs

Mais les héros les plus cités (20 réponses en 6e et 24 en 3e) sont des personnages fictifs, de films, de romans, de mangas… : Luke Skywalker, Batman, Superman… Ces héros-là sont racontés, mis en scène dans les difficultés de la vie quotidienne, mais ils possèdent en général des superpouvoirs qui leur permettent de sortir avec panache de situations difficiles où ils ne sont pas en position forte.

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De ce type de héros, l’écrivain italien Umberto Eco dit qu’il se « console de ne pas être un surhomme ». Et, il est vrai que, dans notre société, l’injonction « soit compétent, soit performant » peut décourager l’apprentissage du « métier » d’humain. Et la naissance du cyber humain ne va pas faciliter l’entrée des adolescents dans la réalité du monde adulte.

Des héros pour mieux vivre

À nous éducateurs, parents, enseignants…, de veiller à proposer aux jeunes que nous accompagnons des figures héroïques, des modèles qui les invitent à vivre plus haut, plus fort dans l’acceptation de leurs limites humaines et pour le bien de l’humanité.

Marie-Agnès Reynaud
(Publié dans « Présence Mariste » n°299, avril 2019)

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