PM 303

Chantez pour Dieu sur des tambourins

Jouez pour le Seigneur sur les cymbales
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La Bible est en soi une musique à la gloire de Dieu. Sur ce fond biblique musical, chant et danse accompagnés d’instruments prennent tout leur sens. (Présence Mariste n°303, avril 2020)

Bernard Faurie

Comment parler de la musique dans la Bible ? Un historien de la musique en ferait un sujet d’étude : il parlerait de la danse et des instruments de musique dans leur évolution à travers les siècles. C’est dire qu’on peut s’intéresser à la musique dans la Bible comme, finalement, on s’intéresserait à la musique dans les épopées d’Homère ou dans le Coran.

Où est donc la différence et justifie que pour un croyant, lecteur de la Bible, le sujet vaille la peine d’être abordé autrement qu’en historien de la musique ?

C’est d’abord dans ce qui peut échapper à l’attention, à savoir que la Bible est en soi une musique à la gloire de Dieu. Sur ce fond biblique musical, chant et danse accompagnés d’instruments prennent tout leur sens.

La musique de la Bible

Lle roi David jouant de la harpe
Dominiquin

Les chrétiens, à l’église, lisent la Bible ; les Juifs, à la synagogue, chantent la Bible. La Bible est un livre de chant. Évidemment, dans nos traductions on ne s’en aperçoit guère !

Chaque verset du texte de la Bible hébraïque est accompagné d’un système d’accents qui en indique la mélodie. Ces accents sont appelés en hébreu « ta’amim », c’est-à-dire « ce qui donne du goût ». Et donc une lecture qui ne respecte pas ces « ta’amim » est une lecture qui manque de goût, de saveur, une lecture bien fade… C’est dire que la musique est un élément intrinsèque à la Bible, inhérent au texte, qui fait corps avec lui et en est inséparable.

Le chant biblique, la Bible chantée si l’on veut, est comme un long fleuve qui va du premier au dernier verset de chaque livre. Et non seulement, car tous les livres de la Loi, notre Pentateuque, sont reliés les uns aux autres par une coordination, à l’exception du cinquième et dernier, le Deutéronome, ce qui indique bien qu’il faut le considérer à part des quatre premiers. Par contre, les livres que nous disons « historiques » : Josué, Juges, Samuel et Rois sont à nouveau reliés entre eux et au Deutéronome qui les précède. C’est donc que ce Deutéronome appartient davantage à ces livres dits « historiques » qu’aux précédents.

Mais c’est là une autre histoire

La musique dans la Bible

Sur ce fond mélodique continu se détachent des textes dont le caractère musical est nettement affirmé. Ce sont des chants et des danses accompagnés par des instruments de musique. Car on ne conçoit pas le chant sans la danse et sans les instruments de musique. Mais chants et danses s’inscrivent sur le fond mélodique, la base musicale, le « substrat » mélodique pour parler comme les linguistes. Dès lors, chants, danses et instruments participent à ce fond mélodique. Ils en sont une expression privilégiée de sorte qu’ils ne peuvent être isolés de ce contexte, pas davantage que l’on pourrait imaginer des îles sans la mer. Le tout à la plus grande gloire de Dieu. Et donc si on s’intéresse au chant, à la danse et aux instruments de musique ce n’est pas en tant que musicologue !

Chants et danses

La messe par Ste Cécile avec des anges
Niolas Poussin

Les chants - appelés aussi cantiques - sont nombreux dans l’un et l’autre Testament. Certains nous sont familiers : le « cantique de la mer » au livre de l’Exode célébrant les exploits du Seigneur lors de la sortie d’Égypte. Nous le chantons la nuit pascale. Ou encore le “cantique de Moïse“, du Deutéronome que le Seigneur lui-même ordonne à Moïse d’écrire. La musique prend grande place dans les cérémonies du Temple. Les chantres forment une corporation de 200 chanteurs et chanteuses selon Esdras. Debout sur les 15 marches conduisant à l’une des portes de l’enceinte du Temple, la porte de Nikanor, ils chantent les 15 « psaumes des montées » en s’accompagnant de la harpe et des cymbales.

Faut-il considérer à part les écrits de notre Nouveau Testament puisqu’ils sont écrits en grec et non pas en hébreu. Le “Magnificat“ de Marie nous est transmis en grec. Pourtant, non, car Marie ne parlait pas le grec mais l’araméen, langue voisine de l’hébreu. Dans ce chant, il y a un fond d’hébreu. Marie emprunte au cantique d’Anne, la mère de Samuel, en chantant son propre cantique. D’autre part, il faut imaginer Marie chantant son Magnificat non pas dans une attitude statique, mais bien en dansant, frappant dans ses mains et frappant des pieds le sol pour marquer la cadence.

Instruments de musique

Le Cantique des Cantiques
Gustave Moreau

L’instrument de prédilection est le « kinnor », que l’on traduit diversement, et pour varier, harpe, lyre ou cithare. Le kinnor a donné son nom au lac de Galilée, le « kinneret », (n’a-t-il pas la forme d’une harpe !). Le kinnor, harpe à dix cordes, est le roi des instruments, idéal pour accompagner le chant des psaumes : « Rendez grâce sur la harpe, sur la lyre, au son des instruments, avec les trompettes, au son du cor, acclamez le roi le Seigneur ». Le psalmiste ne quitte pas sa harpe : Je m’accompagnerai de la harpe pour te célébrer, mon Dieu, sur la lyre je jouerai pour toi, Saint d’Israël.

Le roi David, que l’on représente souvent avec sa harpe, est le musicien auquel on se réfère. On lit dans le livre d’Amos les plaintes du Seigneur contre Israël : « Éloigne de moi le brouhaha de tes cantiques, le jeu de tes harpes je ne peux pas l’entendre » et Amos s’indigne contre ces riches « allongés sur des lits d’ivoire qui improvisent au son de la harpe chantant comme David leurs propres cadences » (6, 4-5).

C’est au son de la harpe que David apaise Saül dans sa démence. Les déportés à Babylone ont perdu le goût de chanter au son de la harpe. La harpe est associée à la flûte, au tambourin. Jean, l’auteur de l’Apocalypse, décrit dans ses visions les vingt-quatre anciens tenant chacun une harpe, il entend une voix qui était « comme le chant des joueurs de harpe chantant un cantique nouveau », et « les anges tenant les harpes de Dieu chantant le cantique de Moïse ».

La Bible est un chant, une musique, et Dieu demande d’être servi dans la joie. On peut chanter avec l’auteur du psaume 43 :“Je monterai à l’autel de Dieu, au Dieu qui me fait danser de joie, et je te célèbrerai sur la harpe, Dieu, mon Dieu !“

Bernard Faurie

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