La vie des Frères sécularisés

« La Police et le Procureur s’acharnaient sur ces hommes ex-religieux par des convocations ou des perquisitions à domicile répétées »

« La Police et le Procureur s’acharnaient sur ces hommes ex-religieux par des convocations ou des perquisitions à domicile répétées mais, si la résistance était organisée et solidaire, on ne pouvait trouver motif légal à l’expulsion d’un citoyen, instituteur libre. Bien des fois, ces traquenards judiciaires, pour pénibles qu’ils soient, devinrent un jeu du chat et de la souris où excellaient l’audace et l’humour, la ténacité et l’insouciance. On pourrait écrire des »fioretti« succulentes sur ces affaires ! »

Méfiance du côté des Supérieurs

« Au début, les Supérieurs considérèrent ces Frères » sécularisés « plus ou moins de leur propre initiative comme des »renégats« , certes continuant leur métier d’Instituteurs catholiques mais ayant pris leur autonomie par rapport à la Congrégation en ne suivant pas les instructions générales concernant les mouvements communautaires vers l’étranger. De plus ils devaient alors proclamer, de bouche et non de cœur, qu’ils ne faisaient plus partie de la Congrégation … »

(relation de Fr. Gaston Layral, Province de Lacabane)

Une vie souvent héroïque

« A St Julien Molesabate se trouvent F. Anselme 60 [ans] et F. Feyeux 80. A eux seuls ils se chargent des deux classes, d’une dizaine de pensionnaires, de tout le temporel, jardin, cuisine. Traitement de 1500 F par an pour les deux et trouvent le moyen de verser 500 Frs à la maison de formation. Pas d’énigme : élevage de poules, cochon, lapins … et l’austérité. »

(relation de Fr. Gaston Layral, Province de Lacabane)

« A St Bouzile (Hérault), F. Orientius a tenu jusqu’en août 1919 jusqu’à 85 ans, faisant sa petite classe d’une trentaine d’élèves. ’Je ne puis faire tout ce qu’il faudrait, je le sens, mais, puisque vous ne trouvez personne pour me remplacer, je tiendrai encore, car je ne veux pas qu’une école de 80 enfants tombe à cause de moi. Si donc je ne suis pas un obstacle au bien et que je ne sois pas trop encombrant pour les Frères, je me dévouerai encore.’ »

(relation de Fr. Gaston Layral, Province de Lacabane)

« En général dans ces localités chrétiennes, à l’époque, la sympathie, j’allais écrire l’affection générale nous fut acquise et ceux qui restèrent fidèles sans vouloir trop se rendre » populaires « se conservèrent à leur institut. Mais les défections furent nombreuses et l’arbre agité et secoué perdit bien des feuilles séchées par cette existence nouvelle, pleine de laisser-aller et de séduction. »

(Relation de F. Louis-Noël, - Province de Beaucamps)

Tolérance pour les maisons de retraite :

Pourront rester à St-Genis-Laval : « 43 vieillards et grands malades pour lesquels Frère Théophane [Supérieur Général] a plaidé ce matin même, auprès du Préfet, le maintien à l’infirmerie du Montet. L’autorisation a finalement été obtenue, mais dans quelles conditions … Pauvres grabataires sans paillasses, anciens sans force, livrés à eux-mêmes … Du moins, les autres infirmeries de nos maisons provinciales bénéficieront de ce passe-droit… »

(Annales de la Province de St-Genis-Laval,
texte présenté par Fr. Bernard Descroix)

" Les Supérieurs dirigèrent à l’Hermitage, avant l’expiration du délai, une quarantaine de vieux Frères devenus inutiles dans les écoles où se fit la sécularisation. Ces bons vétérans arrivèrent à la Maison Provinciale vers le 15 mai, afin d’être nombreux à protester, au cas où aurait lieu une expulsion manu milatari.(…)

Le 19 mai 1903, dans la matinée, M. Marécat, commissaire de police, vint constater. Il trouva 80 vieux Frères ! "

(Annales de N.D. de l’Hermitage - extraits)

(Publié dans « Présence Mariste » n°234, janvier 2003)

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